Parution de l'ouvrage " De Gaulle, géographies (1940-1946) " #VendrediLecture
Le 4 décembre 2020
Retrouvez ce vendredi, votre rendez-vous lecture autour de l’histoire, du patrimoine et de la géostratégie au travers d’un ouvrage. Aujourd’hui, il est proposé de découvrir l’ouvrage « De Gaulle, géographies » de l’Établissement de communication et de production audiovisuelle de la Défense (ECPAD).
Pour parler de cet ouvrage, Madame Catherine Dupuy, enseignante détachée à l’ECPAD, chargée des projets pédagogiques, a accepté de répondre à nos questions.
Retracer les « géographies » de de Gaulle pour comprendre la géographie de la Résistance
De son appel à la résistance depuis Londres en 1940 à son retour en France métropolitaine, le général de Gaulle affirme son engagement et sa lutte en de multiples lieux. Ces déplacements et les rencontres qui y sont liées entérinent son progressif changement de statut tout au long de la Seconde Guerre mondiale et l’exercice du pouvoir qui en découle.
De général de brigade inconnu, il devient chef des Français libres, puis de la France combattante. Les voyages réalisés tout au long de ce parcours ont laissé des traces photographiques conservées dans les archives de l’ECPAD. Les images saisissantes et parfois méconnues que propose de faire découvrir cet ouvrage donnent à voir des lieux mais aussi des symboles, révélant une géographie plus intime du Général.
Un ouvrage photographique pour apprendre autrement sur de Gaulle : rencontre avec Catherine Dupuy
Comment est née l’initiative de l’ouvrage ?
Cette année de Gaulle, placée sous le prisme d’un triple anniversaire (naissance en 1890, appel en 1940, décès en 1970), appelait l’Établissement de communication et de production audiovisuelle de la Défense (ECPAD) à une réalisation ouvragée qui rende compte en images de la geste de l’homme du 18 juin.
Nous avons retenu cet angle d’approche des géographies, comprises comme celles des territoires investis par le Général et de ses rencontres qui en découlent, car il permet d’offrir une lecture polysémique, et originale, des traces photographiques nées de cet appel à la continuation du combat que conservent les archives de notre établissement. Les bornes chronologiques, dont nous avons souhaité qu’elles se prolongent en aval jusqu’à l’été 1946, fixent de façon circulaire le cadre temporel de cette géographie de l’exil, du refus et de la victoire : des premiers pas à Londres à la remise de la croix de la Libération à l’Ile de Sein, dont la majorité des hommes en âge de combattre avait rejoint ce général de brigade inconnu quelques jours après son appel.
Qu’est-ce que l’ECPAD a souhaité montrer sur le général de Gaulle ?
L’ECPAD a souhaité montrer la pluralité des déplacements, des rencontres et des lieux de pouvoir qui donnent à voir la mise en œuvre et l’accomplissement de cette géographie de la résistance : géographie londonienne et impériale de la France libre puis de la France combattante, que le général arpente en de nombreux voyages ; géographie de l’efficience des troupes coloniales qu’il passe fréquemment en revue et des ralliés civils et militaires métropolitains ; géographie des fidélités d’armes, comme avec Catroux et Leclerc et des rapports de force, avec les Alliés anglo-saxons ou le général Giraud ; géographie du symbole, qui convoque annuellement les célébrations gaulliennes et nationales, à Londres ou Alger, puis dans la France libérée ; géographie enfin des acclamations et des bains de foule hexagonaux de celui devenu chef du Gouvernement provisoire de la République française.
Que va apprendre le public à la lecture de l’ouvrage ?
Ces 127 photographies, ainsi que les contenus augmentés filmiques qui en accompagnent certaines d’entre elles, permettent de dessiner les contours géographiques de ce parcours à la fois militaire et politique. Si certaines images sont connues, d’autres sont plus inattendues, mais toutes permettent, comme le souligne très justement Maurice Vaïsse au début de sa préface, de rendre compte du changement de stature du personnage. Cette géographie permet en effet de matérialiser visuellement la patiente construction politique qui conduit le général de Gaulle du refus de la défaite et du choix de l’exil au retour dans la patrie libérée, accomplissant ainsi cette « certaine idée » qu’il se faisait de la France.
Ce livre n’est donc pas une simple synthèse des lieux de résidence ou de passage du général. Nous avons fait des choix d’éditorialisation qui permettent de mettre le curseur sur des lieux en particulier où s’est joué une étape de la construction du pouvoir de De Gaulle, comme à Londres, Alger ou Brazzaville par exemple.
Surtout, cela va permettra au public de découvrir sous un autre angle les images conservées par l’ECPAD, qu’elles soient fixes ou animées !
Pourquoi avoir choisi un rythme chronologique en trois temps dans l’ouvrage ? Ce choix chronologique a-t-il eu un impact sur la sélection et le recueil des informations et des documents ?
Le rythme ternaire adopté permet de dérouler des étapes qui donnent à voir l’accomplissement de ce parcours politique commencé à Londres. Cette géographie séquentielle permet d’acter visuellement les strates chronologiques du changement de statut du général de Gaulle, de l’exercice du pouvoir qui en découle et de la légitimité ainsi acquise. L’ouvrage s’ouvre donc, comme évoqué précédemment, sur les premiers territoires de l’exil avec la capitale britannique et l’empire colonial ; la seconde période, celle d’Alger, prend la mesure de la consolidation du pouvoir ; les paysages et les rencontres hexagonales de la dernière partie fixent le chemin parcouru et la stature d’homme d’État conquise, au-delà de la fin de la Deuxième Guerre mondiale.
Le corpus photographique de ces trois parties n’est pas équivalent, la dernière séquence en convoquant à elle seule la moitié. Ce déséquilibre s’explique : les reportages des opérateurs militaires des différents services producteurs de la France libre, que nous conservons dans nos fonds, sont en effet beaucoup plus fournis pour cette dernière période, qui convoque toute la mémoire imagée de la libération du territoire.
Combien de temps a été nécessaire pour réunir les archives et finaliser l’ouvrage ?
Ce projet a été le fruit d’un travail intense mené sur six mois, au cours desquels nous avons dû mener des recherches approfondies sur le contexte de production des images et leur auteur par exemple. Les clichés de l’époque n’étaient pas toujours crédités, mais rattachés directement à l’organisme producteur. La production et la circulation des images a démarré au début du conflit de manière empirique, avec les forces et les capacités en présence. Il est donc difficile parfois d’identifier l’origine d’une image dont on retrouve des copies dans différents fonds d’archives. Ce projet nous a permis d’avancer dans ces recherches de paternité, en lien avec nos homologues d’autres institutions.
Avec quels organismes/acteurs/services avez-vous travaillé pour retracer le parcours du général de Gaulle entre 1940 et 1946 ?
Nous avons sollicité le Service Historique de la Défense, Bertrand Fonck, François Royal, Stéphane Launey et Benjamlin Doizelet que nous remercions, ainsi que Vladimir Trouplin et Béatrice Parrain, au musée de l’ordre de la Libération. L’historien Maurice Vaïsse nous a fait l’honneur de préfacer l’ouvrage.
Sur quelles compétences internes à l’établissement vous êtes-vous appuyé ?
Nous avons la chance à l’ECPAD de fonctionner à la fois comme un centre d’archives et une agence d’images, si bien que nous avons pu nous appuyer sur notre expertise interne à chaque étape du projet. Le livre a été imaginé en interne par le département de la médiation et des publics qui coordonne la production interne des ouvrages de l’établissement. Les documentalistes de l’ECPAD, spécialistes des fonds relatifs à la Deuxième Guerre mondiale, nous ont accompagné dans la sélection iconographique de l’ouvrage. Ensuite, le laboratoire photographique et les graphistes ont pris le relais pour la conception graphique du livre, qui a été imprimé au pôle graphique de la Défense (PGP)
De quelle façon l’ouvrage permet de renforcer l’impact des réalisations de l’établissement (expositions, applications mobiles, reportages photo, etc.) et en quoi est-il différent des autres ouvrages publiés sur de Gaulle ?
Aujourd’hui, nos projets de médiation sont de plus en plus pensés avec un angle à 360° pour tenir compte d’enjeux pédagogiques, scientifiques et culturels. Dans le cas présent, le livre est complémentaire au jeu sérieux pédagogique que nous avons développé sur de Gaulle, dont le pilote sera prochainement accessible en ligne. En conjuguant à la fois le récit historique et la mise en perspective de nos fonds, le livre s’illustre sur un angle original et inédit, qui met en valeur des images méconnues ou oubliées du public et permet de faire découvrir autrement le patrimoine photographique et audiovisuel de la Défense.
Feuilleter un extrait du livre
« De Gaulle, géographies (1940-1946) »
Établissement de communication et de production audiovisuelle de la Défense (ECPAD)
Format : 21x21
168 pages
127 photos
Paru le 10 novembre 2020
Publié le 4 décembre 2020