Réduire les caractèresAugmenter les caractèresImprimer

De Polytechnique à West Point : un monument commémoratif signé Theunissen

"Le Consrcit de 1814" © Ecole polytechnique

28 juin 2016

Le Conscrit de 1814 qui occupe le centre de la cour d’honneur est connu de tous à l’École polytechnique. La publication de « Corneille et Paul Theunissen. Catalogue raisonné », qui présente le fonds d’archives privé totalement inédit des frères Theunissen dont celui de Corneille auteur du « Conscrit » est l’occasion d’en savoir plus sur ce symbole de l’École.

Le monument

En 1914, la participation de l'École à la défense de Paris fut commémorée, à l’initiative de Société amicale de secours des anciens élèves de Polytechnique, par une statue de Corneille Theunissen connue sous le nom de « le conscrit de 1814 ». Le Monument commémoratif de la bataille de Paris en 1814, représente un polytechnicien, debout, brandissant un sabre devant un canon brisé, pour défendre son drapeau. Il fut inauguré sur le parterre fleuri du pavillon Boncourt à l’École polytechnique alors à Paris, le 8 juillet 1914, en présence du président de la République, Raymond Poincaré et du ministre de la Guerre, Albert Messimy avec la musique de la garde républicaine. Conçue par Corneille Theunissen (1863-1918) et réalisée par le fondeur Alexis Rudier (mort en 1897), l'œuvre reçoit la médaille d'or au Salon des artistes français de 1914. La statue de bronze (un élève de l'École en uniforme de 1814) est placée sur un piédestal de granit rose. L'inauguration du monument eut lieu le 8 juillet 1914, quelques semaines avant le début de la Première Guerre Mondiale.

La statue du conscrit de 1814 qui était placée dans le jardin du Boncourt rue Descartes à Paris, puis en 1980 dans la cour de l'AX (Société amicale des anciens élèves de Polytechnique), est transférée en juillet 1986, au milieu de la cour d'honneur de l'École, installée depuis 1977 à Palaiseau.

L’artiste

Sculpteur d’origine belge, formé à Valenciennes, puis à l’École des beaux-arts de Paris Corneille Theunissen travaillera en étroite collaboration avec son frère Paul. Il tombe cependant dans l’oubli, comme nombre de ses contemporains faute de documentation et suite aux importants dommages causés par les deux guerres mondiales sur ses œuvres. Son atelier de sculpture monumentale parisien avait pourtant été très actif entre 1885 et 1931, son activité ayant été poursuivie par Paul.Le Conscrit de 1814 commandé par l’Ecole polytechnique et inauguré en juillet 1914 s’inscrit à la fin de la carrière de Corneille Theunissen qui meurt en 1918. Second grand prix de Rome en 1888, il obtient la médaille d'or au Salon des artistes français de 1914 avec le Conscrit, témoignant de son adéquation avec les critères du goût de son temps. 

Comme le montre l’ouvrage de référence très documenté de Catherine Limousin, Corneille Theunissen préparait très minutieusement ses créations. Obéissant à des critères académiques, il semble s'attacher à traduire sentiment et mouvement dans son Conscrit, rappelant la sculpture romantique du milieu du 19e siècle.  

La copie

Une copie grandeur nature a été offerte à l'Académie Militaire de West Point (U.S.A) et inaugurée le 21 octobre 1919. En 1919, les élèves de l’École polytechnique reçurent une délégation de 300 cadets de l’école américaine de West-Point, école avec laquelle ils entretenaient depuis longtemps d’excellents rapports, notamment depuis le passage à l’École polytechnique vers 1815-1817de Sylvanus Thayer (Superintendant en charge de West Point de 1817 à 1833), et l’enseignement de Claudius Crozet (promotion 1805 de l’École polytechnique), professeur de Génie à West-Point  de 1816 à 1823.  Cette même année 1919, le 21 octobre, une délégation des élèves de l’École polytechnique se rendait à son tour à West-Point pour remettre une réplique grandeur nature de la statue du Conscrit de 1814.

La maquette

Des répliques de taille réduite de l’œuvre de Theunissen sont réalisées régulièrement depuis. Ces maquettes du monument commémoratif de la bataille de Paris en 1814, en bronze et résine, mesurent 44 cm. Elles représentent un symbole fort de l’École et sont offertes aux partant de l'École ayant occupé des fonctions importantes.

1814 

Les élèves de l’École polytechnique servent dans l’artillerie de la garde nationale de Paris pendant les mois de février et mars 1814 et notamment le jour de l’attaque de la capitale le 30 mars. Les armées coalisées envahissent la France et se dirigent vers Paris. Le 30 mars, les armées russes, prussiennes et autrichiennes s’attaquent à Paris, défendu par de faibles troupes et ses habitants. A la Barrière du Trône, les élèves de l’École polytechnique qui ont demandé à Napoléon de participer à la défense de Paris, servent une batterie de 28 pièces d’artillerie. Ils opposent aux troupes alliées une résistance héroïque et se distinguent assez pour que leur drapeau porte depuis : « Défense de Paris, 1814 ». Le général ennemi Schwarzenberg rendit hommage à l’École en soulignant l’action contre les russes de « l’enragée batterie de Polyteknikum ».

Après la chute de l’Empire, les élèves témoigneront leur fidélité à l’Empereur pendant les Cent-Jours. Ils manifesteront leur opposition à la Restauration par des chahuts, qui provoqueront même le licenciement de l’École entière pour indiscipline en 1816 par Louis XVIII. Deux cents cinquante étudiants sont alors renvoyés, ce qui conduit à la création d'une association polytechnicienne de secours mutuel, ancêtre de la SAS qui fera ériger le « Conscrit de 1814 », en 1914

 

Texte de Madame Marie-Christine Thooris, Chargée du centre de ressources historiques de l'École polytechnique

 

Pour aller plus loin

Portail patrimoine de l’École polytechnique

Inauguration du monument commémoratif de l'École polytechnique à la Défense de Paris en 1814, Paris, École polytechnique, 1916

Limousin, Catherine, Corneille et Paul Theunissen: catalogue raisonné, Paris, Mare et Martin, 2015

Callot, Jean-Pierre, Histoire de l'École polytechnique, Paris, Limoges,  Charles Lavauzelle,1993

Pinet, Gaston, Histoire de l'École polytechnique, Paris, Librairie polytechnique Baudry et cie, 1887 

L'École Polytechnique : un patrimoine inattendu, exposition, Paris, Fondation Mona Bismarck, 9 janvier-28 février 1998

« West-Point et l'École polytechnique », article du numéro spécial de la Revue historique de l'armée "Fraternité d'armes franco-américaine", Paris, Ministère de la guerre, 1957

 

 

 

Le Conscrit de West-Point © École polytechnique Le Conscrit sur le site parisien de l'école © École polytechnique Maquette du conscrit © École polytechnique