Registres du camp de concentration de Mauthausen
Le camp de concentration de Mauthausen est inauguré en 1938 à la suite de l’Anschluss. Il accueille, au départ, les opposants politiques allemands et autrichien. Cependant, dès 1940, des convois transportant des Polonais, Hongrois ou Soviétiques arrivent dans le camp. On peut retrouver également des déportés français, belges ou espagnols. Ces derniers ont été nombreux à être déportés dans le camp.
Situé à une vingtaine de kilomètres de la ville de Linz, en Autriche, la présence de carrière de granit à proximité est déterminante pour le choix de l’emplacement du camp. Les déportés commencent à y travailler assez rapidement après la fin de la construction du camp afin d’approvisionner l’entreprise Deutsche Erd- und Steinwerke GmbH, détenue par les SS.
Les registres originaux du camp de concentration de Mauthausen sont parvenus au ministère des prisonniers, déportés et réfugiés (MPDR) peu après sa libération par les troupes américaines le 5 mai 1945.
Les circonstances qui entourent le sauvetage de ces registres et leur arrivée en France sont assez floues. Cependant, la tradition orale du ministère des anciens combattants et victimes de guerre (MACVG), qui s’est transmise jusqu’à nos jours, est plus que plausible. Les registres auraient été cachés par les déportés qui étaient affectés à la gestion des affectations des déportés (arrivée, affectation dans un Kommando, décès, etc.). En effet, dans un camp de concentration, l’administration, comme une grande partie des tâches quotidiennes, est confiée à des déportés sous la surveillance de la SS et des Kapos.
Cette action, qui comportait d’énormes risques pour les déportés responsables de cette dissimulation, témoigne à la fois de l’esprit de résistance qui existait dans les camps de concentration, ainsi que de la volonté de témoigner de l’indicible horreur de la déportation.
Probablement confiés aux membres de la mission française du MPDR, venue à Mauthausen pour préparer le rapatriement des survivants, les registres ont intégré le fonds d’archives en cours de constitution à Paris. Cette documentation unique servit d’abord dans le cadre administratif, notamment suite à la création des statuts de déportés politiques et résistants. Les fonctionnaires du MACVG en charge de l’étude des demandes exprimées par les déportés ou leurs familles pouvaient ainsi vérifier la véracité des informations données par les demandeurs à partir de documents originaux.
De nos jours, ces registres ont une tout autre portée. Ils sont le témoignage brut du système concentrationnaire nazi : une litanie de noms et de matricules de déportés, arrêtés et transportés à Mauthausen par convois entiers depuis toute l’Europe occupée. On y retrouve pêle-mêle des Allemands, des Polonais, des Français, des républicains espagnols déportés de France, des Italiens, des Soviétiques, etc. Ceux qui sont décédés sont barrés d’un trait rouge, ceux qui partent dans un autre camp ou vers un Kommando d’un trait bleu. La date de l’événement est scrupuleusement notée et ce jusque dans les semaines précédant la libération du camp. Cette rigueur froide, comptable, résume parfaitement l’horreur du fonctionnement d’un camp de concentration, où le déporté n’est plus rien d’autre qu’un matricule, dont le trépas ou le transfert est assimilé à celui d’un simple objet.
Dernière mise à jour le 11.09.2024